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Saint-Chamond
14 avril 2016

Saint-Chamond, par Maurice de Boissieu (1889)

dessin de Boissieu (1)

 

 

Saint-Chamond, par Maurice de Boissieu

(1889)

 

Saint-Chamond (Sanctus Annemundus, San Chamou). - Placé au point d'intersection de plusieurs voies antiques (1), Saint-Chamond a-t-il eu pour origine, comme on l'a prétendu, un poste militaire romain ? On ne peut l'affirmer avec certitude. Même obscurité pour le nom sous lequel Saint-Chamond aurait été connu avant de porter le nom du saint martyr lyonnais.

L'aqueduc romain qui conduisait à Lyon les eaux du Gier, et dont nous reparlerons plus au long en nous occupant du village d'Isieu, longe souterrainement et à mi-côte la colline au nord du ruisseau du Janon et de la ville de Saint-Chamond ; il a été récemment rencontré au territoire de Lavieu, par des travaux de défoncement pour vignes dans les propriétés Rossary et Vial.

 

dessin de Boissieu (4)
la maison des chanoines

 

Au Xe siècle, Saint-Chamond appartenait aux comtes de Forez (2).

En 1173, Guy II, comte de Forez, cédait à l'archevêque de Lyon, Guichard, le fief des deux châteaux de Saint-Chamond (3), dont les de Jarez étaient seigneurs.

À ceux-ci succédèrent, au XIIIe siècle, les Durgel Saint-Priest, par le mariage de Josserand Durgel avec Matalone de Jarez, dernière de la race ; au XVIe, les Mitte de Chevrières, par le mariage de Jacques Mitte avec Gabrielle Durgel de Saint-Chamond, en 1577 ; au XVIIe, les La Vieuville, dont l'un, Charles-Emmanuel, épousa en 1684 Marie-Anne Mitte de Chevrières, et enfin, au XVIIIe, les Mondragon qui, en 1768, acquirent des La Vieuville la terre de Saint-Chamond.

Cette seigneurie, qui portait le titre de première baronnie du Lyonnais, avait été érigée en marquisat en 1616.

L'histoire de Saint-Chamond, jusqu'au XVIe siècle, se confond avec celle des seigneurs. Guy de Jarez avait accordé aux habitants, en 1224, leur première charte de franchises : ses successeurs confirmèrent et augmentèrent progressivement les libertés concédées.

Les chroniques des guerres du XVIe siècle dans nos provinces ont retenu les noms de Christophe de Saint-Chamond et de Jacques Mitte de Chevrières ; dans l'histoire du règne de Louis XIII, Melchior de Chevrières, marquis de Saint-Chamond, ambassadeur, ministre d'État et maréchal de camp, est souvent mentionné.

 

dessin de Boissieu (3)
les chanées (gouttières) sur les rives du Gier

 

Les industries qui devaient faire la prospérité de Saint-Chamond y apparaissent dès les premières années du XVIe siècle. On rencontre fréquemment alors dans les registres la qualification de faber, "faure" (ouvrier travaillant le fer), et, de 1530 à 1550, celle de ribanderius, "ribandier".

En 1515, dit-on, l'abbesse de Saint-Pierre de Lyon avait installé à Isieu le premier métier à rubans. En 1537, Saint-Chamond envoyait à Lyon des ouvriers habiles à "devuyder la soye", et, en 1539, Christophe de Crémone et ses fils y transportaient "trois molins à filler et retordre soye, lesquels ils avoient à Saint-Chaumont" (4).

Au XVIIe siècle, grâce à la sécurité désormais assurée, la ville, jusqu'alors groupée sur la colline et enfermée dans les murailles qui la reliaient aux remparts du château, se développa dans la vallée : de nombreux mouliniers s'établirent sur les rives du Gier et l'industrie de la soie prit un grand essor.

C'est alors que la plupart des couvents et des édifices religieux de Saint-Chamond furent fondés, élevés ou restaurés par le seigneur Melchior de Chevrières.

 

dessin de Boissieu (5)
l'église Saint-Pierre et sa coupole, sur les bords du Gier, en 1830

 

L'église Saint-Pierre, qui était, avant 1563, à l'angle nord-est du château, fut bâtie, en 1609, sur l'emplacement de la chapelle de Sainte-Barbe, fondée elle-même, en 1480, par Mathieu Palerne. Le pignon qui surmonte le porche à deux arcades de la façade porte les armes de Melchior Mitte de Chevrières et une longue inscription en son honneur.

Au nord, est le clocher, couvert d'une coupole en métal. Sur la vaste nef plafonnée s'ouvrent onze chapelles voûtées à nervures ; le choeur carré est garni d'une fort belle boiserie ; dans une chapelle à droite sont des reliques insignes, et, dans plusieurs autres, d'anciens tableaux dont un attribué au Giotto ; ces pieux trésors avaient pour la plupart été apportés par Melchior Mitte de Chevrières, au retour d'une de ses ambassades, et donnés par lui à son église collégiale de Saint-Jean-Baptiste.

Celle-ci, que desservait un chapitre de douze chanoines, fut élevée de 1634 à 1642 sur le plan d'une croix latine dont les quatre branches s'arrondissaient en absides, la branche la plus longue formant le choeur. Il n'en subsiste qu'une portion d'abside, ajourée de ligues fenêtres à plein cintre, et l'escalier monumental qui y donnait accès.

L'Hôtel-Dieu de Saint-Chamond reçut en 1616, 1635, 1659, etc., d'importantes fondations. Cet hospice, déjà mentionné dans un acte de fondation de 1561, et en 1580, dans le testament de Christophe de Saint-Chamond, avait remplacé l'hôpital situé sur le pont du Gier et qui est signalé dans des fondations des XIV et XVe siècles, sous le nom d'hôpital de Notre-Dame et ensuite de Saint-Antoine.

Renversée par une crue subite du Gier, l'église de Notre-Dame fut reconstruite, de 1616 à 1622, dans le pré Saint-Antoine. De 1875 à 1881, elle a été rebâtie sur le même emplacement, en style du XIVe siècle, par l'architecte Journoud. Les boiseries remarquables qui garnissaient le choeur de l'édifice du XVIIe siècle ont appartenu à M. Chavanne et ne sont plus en Forez.

 

dessin de Boissieu (8)
église Notre-Dame, dessin de Mme Condamin

 

L'église de Saint-Ennemond, la plus ancienne de Saint-Chamond, qui avait été pillée, dévastée et vendue en 1793, a été rebâtie et ouverte au culte en 1856. Le clocher du XVIIe siècle a été conservé, et au-dessous, sur la porte d'entrée du porche, on lit la date de 1688.

Seul le vieux quartier où s'élève cette église, avec ses rues étroites, raides et tortueuses, ses maisons basses et ses petits jardins en terrasse, rappelle l'ancien Saint-Chamond. Sur les bords du Gier, quelques maisons, dont les balcons en bois menacent ruine, présentent encore dans leur délabrement, un aspect pittoresque.

 

dessin de Boissieu (2)
ancien quartier, démoli dans les années 1880

 

À la montée des Capucins, on longe de grands murs de clôture, seuls restes de l'ancien couvent de ces religieux, construit de 1601 à 1608 et dont l'emplacement est occupé par la maison moderne des religieuses de Saint-Charles. Le couvent des Ursulines, fondé en 1618, n'occupe plus les mêmes bâtiments ; celui des Minimes, qui datait de 1622, a disparu.

 

dessin de Boissieu (1)
à gauche, l'église Saint-Pierre ; à droite, la colline Saint-Ennemond

 

Il reste du vieux château, au-dessous de la maison des Frères de la doctrine chrétienne, d'immenses murs qui ont fait partie des terrasses, et les écuries converties en grande salle de fêtes du pensionnat ; au sommet de la montagne, au fond d'une ruelle, un portail du XVIIe siècle, et, tout près de là, l'angle nord-est du château, paraissant de la même époque et englobé dans des constructions modernes.

De la colline au midi de Saint-Chamond, sur laquelle s'élèvent la gare du chemin de fer et le beau collège des pères Maristes, les regards de l'archéologue et du dessinateur se portent avec intérêt sur ces débris et sur ceux de l'église Saint-Jean-Baptiste situés au-dessous.

Quelques maisons de la Grande-Rue présentent, dans leurs façades et dans les galeries, portes et puits de leurs cours, des spécimens de l'architecture locale des deux derniers siècles, et on peut voir, dans la maison du XVIIe siècle qui porte le n° 49 de la rue Ventefol, un joli portail, un escalier à galeries, sur la porte de cet escalier une imposte en fer forgé et, dans une jolie niche sur le mur de façade, une Piété, groupe en pierre, du commencement du XVIe siècle.

Maurice de Boissieu (1844-1933)
in Le Forez pittoresque et monumental,
par F. Thiollier, Lyon, 1889

Maurice de Boissieu portrait

1 - Guigue, Voies antiques du Lyonnais, p. 74.
2 - La Mure Chantelauze, Histoire des ducs de Bourbon, t. I, p. 56-112.
3 - Ibidem, t. III, p. 28.
4 - V. de Valous, Étienne Turquet et les origines de la fabrique lyonnaise, p. 55.

 

* les dessins proviennent de l'ouvrage dans lequel est publié l'article de Maurice de Boissieu. La photo de celui-ci est tirée du Bulletin de la Diana, tome vingt-quatrième, 1931-1934, Montbrison, 1935, hors-texte, p. 360.

 

dessin de Boissieu (6)
Saint-Chamond, les bords du Janon

 

dessin de Boissieu (7)
Saint-Chamond, les bords du Janon, dessin de Mme Condamin (la légende semble erronée : il s'agit du Gier)

 

transcription et mise en page, Michel Renard

 

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